Des ambitions différentes
Contrairement aux idées parfois véhiculées, les élèves de ces territoires ruraux se sentent aussi compétents scolairement que leurs pairs des villes. Les résultats des questionnaires montrent que nombre d’entre eux estiment qu’ils réussissent plutôt bien à l’école et qu’ils sont en mesure de répondre aux attendus scolaires.
Les élèves rapportent également un soutien, de la part de leur famille, plus important qu’en ville en ce qui concerne les devoirs. Cela se traduit par un niveau d’investissement scolaire perçu comme plus élevé pour les écoliers et les élèves de sixième de ces territoires même si la différence s’estompe en fin de collège.
La différence avec les zones urbaines réside dans une plus grande homogénéité de ce public, pour lequel les positionnements extrêmes (sentiment très positif ou très négatif de ses compétences) se font plus rares.
Malgré des fragilités sociales parfois importantes et susceptibles d’affecter la réussite et la motivation scolaire, les enseignants de ces territoires sont très engagés dans la lutte contre l’échec scolaire. Ils soulignent l’importance de proposer un enseignement adapté à chacun, avec des situations de niveaux différents, un accompagnement régulier et un soutien individuel des élèves afin de donner confiance et soutenir les élèves les plus en difficulté.
Dans le même sens, de nombreux enseignants rapportent limiter les comparaisons entre les élèves afin de préserver les plus fragiles et de centrer les élèves sur leurs propres progrès.
Au-delà de l’autocensure régulièrement évoquée pour désigner le manque d’ambition des élèves des territoires ruraux, on pourrait, pour bon nombre d’entre eux, interpréter ces différences comme traduisant des ambitions autres, éloignées de la performance et de la compétition scolaire. Celles-ci résideraient avant tout dans le désir construit par les élèves avec les différents membres de la communauté éducative de préserver un mode de vie familier, qui s’inscrive dans un climat serein, propice à la préservation des liens de proximité.
Il s’agit donc d’abord pour ces élèves de s’insérer dans le tissu social local. Ces attentes sont parfois difficilement compatibles avec l’ambition de poursuivre des études longues et sélectives impliquant mobilité, compétition et possible perte de repères.
Le défi à venir consiste à préserver et à renforcer ces atouts de l’enseignement en territoire rural, mais également à accompagner les équipes éducatives dans la construction de parcours sécurisés diversifiés, permettant une plus grande ouverture des possibles pour ces élèves.