Vers une modification des paysages olfactifs ?
Outre ces polluants, le changement climatique global, notamment les augmentations du taux de CO2 et les élévations de température, affecte lui-même les métabolismes des plantes qui réagissent en modifiant qualitativement et quantitativement leurs émissions. Il faut nous attendre à ce que les paysages olfactifs se modifient profondément dans les décennies à venir. Si l’essor de l’écologie chimique nous a permis de percer les secrets de la communication olfactive, nous sommes en revanche encore loin de pouvoir évaluer l’importance globale de ces paysages olfactifs sur la biodiversité et les conséquences de leur altération. Par un effet de levier, toute modification de signaux essentiels à la localisation d’une ressource vitale, ou à la synchronisation des cycles de deux espèces, peut avoir des répercussions importantes sur les populations d’animaux ou les communautés végétales.
Les impacts seront d’autant plus importants sur les espèces spécialistes qui utilisent des signaux très spécifiques pour localiser leur hôte. Ainsi faudrait-il nous interroger sur la nécessité de prendre en compte la dimension sensorielle dans les programmes de gestion de la biodiversité. Nos données en la matière sont très récentes, les analyses ne remontant qu’à quelques dizaines d’années. Il serait donc urgent de faire l’état des lieux des paysages odorants, de suivre leur évolution, d’évaluer les risques représentés par chaque type de perturbation, puis de rechercher des méthodes permettant de préserver leurs composantes importantes.
On tente déjà de remédier aux nuisances engendrées par les plates-formes de compostage ou les bâtiments d’élevage en diffusant des odeurs masquantes ou en entourant les sites émetteurs de haies végétales qui créent des turbulences diluant les émissions et les dirigent plus haut dans l’atmosphère.
Outre la perte sensorielle que nous ressentirions lors d’une balade en forêt devenue inodore, l’impact pourrait être important pour des populations d’insectes déjà fragilisées par de multiples stress et les communautés végétales privées de leur moyen de communiquer.