Ce qui permet aussi de recréer du lien avec des producteurs-artisans qui sont au plus près de la réalité. Cela aussi, c’est l’esprit Laudato Si’ … Manger local, c’est apporter des nouvelles couleurs et des nouvelles saveurs dans son assiette. Mais c’est aussi recréer du lien. Cela rend heureux et fait du bien au corps comme à l’esprit.
Vous évoquez dans votre livre un autre chiffre choc : 10 millions de tonnes, c’est le poids du gaspillage alimentaire chaque année en France. Comment cuisiner de façon éthique et anti-gaspillage ?
Pour moi c’est encore une question de bon sens. Premièrement, il ne faut pas tomber dans le piège de la peur de manquer. Il faut se contenter de consommer ce dont on a besoin, et seulement ce dont on a besoin. C’est la clé. Le chrétien doit faire intérieurement un acte de foi et se dire qu’il n’a pas besoin du trop, il n’a pas besoin de sur-stocker ni de sur-consommer. Apaisé et confiant, ce consommateur ira alors chercher ses légumes de saison, il apprendra à mesurer la juste quantité, la juste qualité et le juste besoin. Au lieu d’aller vite, il prendra aussi le temps de s’émerveiller devant la Création. Pour moi, c’est un processus de petits gestes qui peut transformer en profondeur notre façon de vivre. Impossible de ne pas penser à cette phrase du pape François : « Lorsque nous jetons de la nourriture, c’est comme si nous l’avions volée à la table du pauvre, de celui qui a faim ! »
Vous préconisez également d’alléger sa cuisine en ustensiles et équipements… En quoi ce minimalisme est-il nécessaire selon vous ?
Je pense que cela vaut la peine de se poser la question tout simplement : de quoi ai-je vraiment besoin ? Si on se sépare du superflu, on laisse de la place à l’essentiel et tout se remet dans l’ordre. Avoir une cuisine surchargée de robots, c’est manquer de place, mais aussi avoir le réflexe de se décharger du geste de cuisiner. Alors que faire une pâte à la main nous fait entrer autant dans la matière que de donner du sens. La cuisine prend du temps ? Oui, absolument. Mais n’est-ce pas un temps mieux utilisé que celui qu’on perd sur son smartphone chaque jour ?
Se balader dans la campagne, cultiver son jardin, cueillir, cuisiner, voilà une belle reconduction. Cette pensée du pape François m’inspire chaque jour : « Ce n’est pas moins de vie, ce n’est pas une basse intensité de vie mais tout le contraire. Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent, en nous rendant ainsi disponibles aux multiples possibilités qu’offre la vie. L’heure est arrivée de réaliser que cette joyeuse superficialité nous a peu servi. »
Votre livre est solidaire : vous vous engagez à reverser 50% des droits d’auteur au profit de Lazare, une association qui anime et développe des colocations solidaires entre des jeunes actifs et des personnes sans-abris. Pourquoi Lazare ?
Ce livre est né d’une rencontre avec mes amis de Lazare. Depuis longtemps je suis proche de cette association. J’y enseigne bénévolement les bases d’une « alimentation positive ». Et c’est justement cette expérience chez Lazare qui m’a encouragée à rassembler dans un livre mes recettes et ma vision d’une cuisine respectueuse de notre « maison commune ».
Que mijotez-vous pour ce soir ?
Un reste de soupe de potimarron avec un peu de lait de coco et des brisures de châtaignes ramassées le week-end dernier en famille. En entrée, il y aura peut-être aussi une tartine du pain dur qui reste, avec du miel, du comté et des noix. Comme dessert, il me reste un fond de compote de pommes. J’en aurai pour cinq minutes : juste un petit coup de four pour la tartine. C’est simple, 100% saison et 100% savoureux !